Accéder au contenu principal

SOUS LES BRUMES DE VELWYN

Il y a bien longtemps, quand les arbres d’Eriawn étaient plus hauts que des montagnes et que les étoiles semblaient chuchoter aux enfants, un jeune garçon nommé Caelum vivait à la lisière de la Forêt Murmureuse. Caelum n’était pas un héros. Il n’était ni grand, ni fort, ni même particulièrement malin. Il avait ce que les anciens appelaient "l’étoffe des rêveurs" — une flamme fragile mais tenace, celle qu'on ne voit qu’à la tombée du soir.

Chaque nuit, alors que la brume rampait entre les racines comme une bête lente, Caelum grimpait au sommet de la vieille tour effondrée près de son village. Là, il tendait l’oreille. Car il savait que certains soirs, si l’on était patient, les arbres parlaient.




Une nuit sans lune, alors que le silence était si épais qu'on aurait cru entendre son propre sang couler, Caelum entendit enfin quelque chose. Ce n'était pas un murmure d'arbre, non... C’était un chant. Une mélodie ancienne, vibrante, comme tissée de lumière et d’ombre. Il suivit ce chant, pieds nus sur l’herbe froide, jusqu’à une clairière cachée où un cercle de pierres moussues dressait ses ombres sous les étoiles. Là, au centre, flottait une lumière pâle : une larme, suspendue, frémissante. Une Larme d’Arianwen.

Sans vraiment savoir pourquoi, Caelum tendit la main Quand ses doigts effleurèrent la lumière, il vit tout : les dragons qui dansaient dans les cieux de Norgard, les cités oubliées ensevelies sous les sables de Galadrion, les Léonides chassés, les serments trahis, les siècles de guerre et d'espoir Et il comprit. La larme n'était pas faite pour lui. Ni pour aucun être seul. Elle était un éclat d'équilibre, à partager, à protéger. Non pas un pouvoir à posséder, mais un chant à entendre et transmettre.

Mais déjà, des bruits de pas troublaient la brume. Ceux qui avaient oublié d’écouter arrivaient, avides de prendre Alors Caelum, avec un sourire triste, laissa tomber la larme au sol. Elle éclata en mille fragments de lumière, chacun s’envolant vers un coin d'Heldion, pour se cacher dans le cœur de ceux qui sauraient encore rêver.

Depuis ce soir-là, nul ne revit Caelum. Mais parfois, au bord des bois de Velwyn, quand la brume est juste assez fine, quand le vent se tait et que les étoiles veillent...
On peut entendre un petit air de flûte. Léger. Fugace. Comme un rêve qui n’aurait pas voulu mourir.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

LA SIERTA Serres d'Argent

  Elle courait à en perdre haleine. Sa longue chevelure argentée volait derrière elle et la sueur ruisselait déjà sur son front. Elle tourna brusquement dans une ruelle sur sa gauche. Deux guerriers suivirent, la poursuivant à toute allure. Elle hésita et tourna cette fois à droite. Malheureusement, ses craintes étaient confirmées, il s’agissait d’une impasse. Le mur était haut de près de quatre mètres, mais la jeune Sierta bondit habilement pour atteindre le toit. Elle effleura le cache moineau du bout des doigts, mais retomba souplement sur le pavé de la ruelle. Accroupie, dos au mur, la Sierta, mi-femme, mi-féline, releva lentement la tête. Elle fixa avec fureur les deux hommes qui venaient de la rattraper. Les gardes dégainèrent leurs épées. — Rends-toi sale bête et tu auras la vie sauve. Si tu te refuses, tu goûteras au fer de nos lames.  — Plutôt mourir que de vivre comme une esclave !  Sur ces mots, la femme-féline dégaina une dague. — Que reprochez-vous à cette je...

BRACKEMARD & LE SERPENT MAUDIT

 Une histoire à ne pas mettre entre toutes les mains ! Brackemard était un mercenaire réputé dans les îles confédérées du nord. Sa spécialité ? La chasse aux nuisibles. C'est justement un serpent nuisible qui troublait le quotidien des villageois de Slibart, un village tout ce qu'il y avait de plus modeste. Mais il ne s'agissait pas de n'importe quel serpent, celui-ci était maudit !  Une malédiction ancestrale de la déesse Airpesocu elle-même ! Le serpent était-il dangereux ? Oui et non, oui et non. Mais il s'agissait néanmoins d'un serpent morbianal, une variété particulièrement particulière. Le serpent morbianal avait une caractéristique unique : il dégageait une odeur si pestilentielle qu’elle pouvait faire tomber dans les pommes un troll enrhumé. Mais ce n’était pas tout. En plus de puer comme un vieux fromage oublié sous un soleil de plomb, il chantait. Ou plutôt, il tentait de chanter. D'une voix nasillarde et tremblotante, il hurlait des chants sacrés...